Soutenance de thèse de Didem Nur Gungoren Erol – Lettres et arts spécialité littératures française et francophone

Résumé

À la recherche du temps perdu met en fiction le passage de l’expérience sensible au langage et à la création littéraire non seulement en théorie dans Le Temps retrouvé, mais aussi en pratique dans le parcours du personnage fictionnel.

Proust, qui part « très loin dans la fixation des rapports du visible et de l’invisible, dans la description d’une idée qui n’est pas le contraire du sensible, qui en est la doublure et la profondeur » selon Merleau-Ponty (Le visible et l’invisible, p. 193), nous laisse une formule à déchiffrer, à comprendre aussi par une approche plus contemporaine que moderne : malgré sa formation intellectuelle ancrée dans la philosophie idéaliste de la fin du 19^e siècle, Proust est miraculeusement contemporain en élaborant des thèmes comme la mémoire corporelle, le corps vécu, le temps sensible, à la recherche d’une réalité transcendantale, mais en même temps mondaine (dans le monde), donc à échelle de l’homme, liée à sa vie qui est à la fois biologique, psychologique, interpersonnelle et à ses créations esthétiques. Notre thèse revisite la philosophie romanesque proustienne à partir de ces thèmes qui émergent dans la phénoménologie du 20^e siècle et seront principalement développés et conceptualisés par Merleau-Ponty, qui s’est beaucoup inspiré du roman proustien.

Notre hypothèse consiste à lire le cheminement du personnage fictionnel comme un parcours expérimental de découverte du sensible dans toutes les dimensions de l’expérience vécue. Notre intention est de repenser ce « moi » proustien (déjà beaucoup analysé par la critique universitaire) selon les concepts merleau-pontiens. Notre but est de montrer qu’il existe chez Proust une pensée déjà phénoménologique de l’expérience et de la création artistique qui ne s’exprime pas de manière théorique en concepts, mais par la fiction romanesque en figures et en situations, qui communiquent aux lecteurs ses découvertes de manière sensible.

Composition du jury

• Françoise LERICHE, Professeure émérite, Université Grenoble Alpes, Directrice de thèse
• Stéphane CHAUDIER, Professeur, Université de Lille, Rapporteur
• Stefan KRISTENSEN, Professeur, Université de Strasbourg, Rapporteur
• Florence GODEAU, Professeure, Universite Jean Moulin Lyon 3, Examinatrice
• Isabelle KRZYWKOWSKI, Professeure, Université Grenoble Alpes, Examinatrice