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Le projet RhéF-R : l’UMR décroche une nouvelle ANR !

Axe 1

Le projet RhéF-R, “Les Rhétoriqueurs face à la Renaissance : hybridations génériques autour de 1500”, est coordonné par Ellen Delvallée, chargée de recherche CNRS dans notre laboratoire. Lauréat en 2024 d’une ANR “Jeunes Chercheuses – Jeunes Chercheurs”, il porte sur la poésie au tournant des XVe et XVIe siècles, offrant une nouvelle façon d’expliquer sa bigarrure et qui ambitionne de donner de nouveaux outils pour penser l’histoire littéraire de la période.

Objectifs du projet

La production poétique autour de 1500, chez les Rhétoriqueurs de France, se caractérise par des hybridations génériques de différentes sortes (chronique/épopée, propagande ou leçon morale/lyrisme, discours officiel/épistolarité familière, genres poétiques brefs/narration, etc.). Le postulat est que ces croisements manifestent une confrontation entre une tradition poétique française toujours vivace et des nouvelles ressources littéraires qui caractérisent la Renaissance (découvertes et éditions critiques d’auteurs antiques, diffusion de la poésie italienne).

Les Rhétoriqueurs de France découvrent en effet la culture italienne et leur revendication d’une « Renaissance » des arts au moment des guerres d’Italie : ils sont alors confrontés à un renouveau littéraire riche et attrayant mais incarné par l’ennemi. Les croisements qu’ils opèrent entre différents genres poétiques révèlent ainsi une véritable prise de position face à cette Renaissance : celle d’une appropriation critique, qui refuse de remplacer purement et simplement la tradition poétique française, comme le feront plus tard les poètes de la Pléiade. 

Ce projet ambitionne donc de modifier la représentation de l’histoire littéraire française autour de 1500, en donnant les moyens de remplacer le récit téléologique d’un « Moyen Âge » suivi d’une « Renaissance », qui a longtemps prévalu. Il se déclinera en deux chantiers : l’étude et l’édition d’un corpus test, et l’étude littéraire.

Un cas test : l’édition numérique de la Chronique française de Guillaume Cretin, entre historiographie médiévale et poésie renaissante

Écrite par Guillaume Cretin, chanoine de Vincennes et aumônier du roi en plus d’être poète accompli, la Chronique française, vaste saga de la monarchie française commandée par François Ier au début de son règne (1515), a l’avantage d’avoir été totalement délaissée par la critique et de représenter un volume conséquent (25 000 vers). En outre, elle constitue un cas remarquable d’étude de l’hybridité générique, puisqu’elle adopte le vers pour une production historiographique qui se faisait alors largement en prose, comprend des séquences épistolaires ou élégiaques, choisit une structure en partie romanesque, avec des séquences épiques.

L’édition numérique de ce texte permettra d’éclairer la façon dont a été conçu et reçu un tel mélange.

Cette édition a été lancée en 2021 en collaboration avec Antoine Brix (U. de Louvain-la-Neuve) et l’équipe d’ingénieur·es ELAN de l’UMR Litt&Arts, grâce à un financement issu de l’AAP IRGA (Initiatives de Recherche à Grenoble Alpes). La plate-forme éditoriale « CreNum » a été développée par l’équipe ELAN pour accueillir cette édition critique, qui comprend désormais également une étude des peintures du manuscrit, menée par Christiane Raynaud (Aix-Marseille U.).

Le projet des cinq prochaines années est de poursuivre l’édition critique, en mettant les analyses effectuées sur les deux premiers livres à l’épreuve de ceux rédigés plus tardivement. 

Une étude d’histoire littéraire sur les hybridations génériques chez les Rhétoriqueurs de France

Une monographie permettra de préciser l’hypothèse au fondement du projet, celle d’une prise de position esthétique des Rhétoriqueurs reposant sur une appropriation indéniable mais critique du renouveau antique porté par l’Italie, qui se traduit, dans leur production poétique, par des croisements complexes entre différents genres.

Les huit Rhétoriqueurs choisis dans le corpus primaire d’étude – Jean Robertet, Octovien de Saint-Gelais, André de La Vigne, Jean d’Auton, Jean Marot, Jean Picart, Jean Lemaire de Belges et Guillaume Cretin – couvrent deux générations, ce qui permettra d’envisager une évolution des choix esthétiques effectués au cours de la période d’étude. Ils ont aussi pour intérêt de provenir de cours et milieux différents. Or d’un milieu à l’autre et d’une période à l’autre, les enjeux nationaux dans le rapport à la culture italienne divergent, ainsi que l’accès aux sources antiques transmises par les presses ou les lettrés italiens. L’étude de ce corpus se fera au moyen de trois approches complémentaires, déjà mobilisées pour l’étude de la Chronique française :

  • L’étude des éléments biographiques et matériels, pour déterminer quels accès ces auteurs avaient à la culture antique.
  • L’enquête sur les traductions et intertextes entre écrits des Rhétoriqueurs et sources antiques et italiennes ; la notion d’imitation.
  • L’analyse des discours tenus sur la culture antique et italienne. 

Coordination du projet

L’équipe de spécialistes de renommée internationale (Royaume-Uni, Belgique, Suisse, Italie) réunie pour ce projet a pour ambition de fédérer, à Litt&Arts, des chercheur·ses aux spécialités complémentaires, au croisement de plusieurs disciplines (histoire, littérature, philologie) et de différentes périodes (médiévistes et seiziémistes).

Dans cette perspective, elle intégrera prochainement un ingénieur de recherche, chargé notamment de la transcription et de la collation automatisée des manuscrits des livres III à V de la Chronique française, c'est-à-dire de la comparaison du texte contenu par tous les manuscrits, afin de déterminer comment le texte a évolué, s’il y a eu des erreurs commises dans la copie, des réécritures ou des versions alternatives ; et un·e chercheur·se en post-doctorat chargé·e notamment des recherches sur les sources de Cretin.

L’implication de l’équipe d’ingénieur·es en humanités numériques ELAN est également un atout essentiel à la réussite du projet.

Retombées du projet

Dans le but de promouvoir les relations entre science et société, il est prévu que la porteuse du projet et son équipe participent à différentes manifestations mettant à l’honneur la science auprès du grand public, telles que le cycle de conférences « Avenue centrale » de la MSH-Alpes (retransmises en direct sur YouTube et disponibles en podcast) et la Fête de la Science, organisée tous les ans en octobre, avec notamment des manifestations sur le campus de l’UGA ou à la Casemate.

Article rédigé par Ellen Delvallée

Contact

ellen.delvalleeatuniv-grenoble-alpes.fr (Ellen Delvallée)

Submitted on 20 February 2025

Updated on 21 February 2025